"Quand Vincent Aurez parle d'intelligence artificielie, ses phrases accélèrent. Chez lui, la technologie n'est pas un vernis : c'est une obsession, née un soir de novembre où ChatGPT entre dans sa vie... en même temps que son premier rendez-vous en banque privée."
Avant Figen AI, lancé début 2024, Aurez a déjà vécu plusieurs vies. EY, les réseaux bancaires européens, puis Novaxia où il devient directeur de l'innovation. C'est là qu'il dé couvre un secteur où la créativité rencontre la réglementation. Et c'est surtout là qu'il s'imprègne de la réalité du terrain: les CGP qu'il voit «faire le tour de France des questions patrimoniales», démunis face à des masses de textes, de rapports, de jurisprudence.
Alors il se met à apprendre. Comme un geek consciencieux : séminaires techniques pendant ses congés, nuits passées à tester des modèles, et deux ans de quête d'un associé. II trouve finalement Nicolas Paulus, ingénieur-entrepreneur pré coce (première société créée à 17 ans, vendue récemment), ancien pro-gamer et développeur compulsif. Ensemble, ils bâtissent une vision : créer non pas un “logiciel” de plus, mais des agents IA capables d'absorber des millions de documents officiels, de comprendre la fiscalité, de lire les bulletins SCPI ou les codes monétaires, et de transformer tout cela en outils concrets pour les professionnels.
ILa première IA dédiée au patrimoine
« On a écrit une encyclopédie patrimoniale de 15 000 pages », sourit Aurez. De quoi entraîner un assistant qui ne fait «presque plus d'erreurs » et qui, surtout, n'hallucine pas comme les IA généralistes. À partir de là, tout s'enchaîne: un enregistreur qui retranscrit un rendez-vous client, identifie les participants, remplit automatiquement le CRM, produit la conformité et prépare le rapport d'adéquation. Résultat : six heures gagnées par semaine en moyenne pour un conseiller. L'abonnement? 99 euros par mois, sans version gratuite « parce que nos utilisateurs veulent un outil professionnel, pas unjouet ». En onze mois d'existence, Figen AI revendique 1 200 clients payants : indépendants, groupements, une mutuelle, une banque privée et un POC en cours avec un grand réseau bancaire. L'entreprise s'auto finance, refuse les rachats, avance vite, mais prudemment. «Plus ily aura d'IA, plus il faudra d'humain », insiste Aurez. Pour lui, l'IA ne tue pas le conseil : elle tue l'administratif. Et elle replace le conseiller là où il est indispensable : comprendre une histoire personnelle, un trau matisme immobilier ancien, un héritage délicat, un rapport complexe au risque.
La suite est déjà en marche : une base SCPI colossale, mise à jour en continu ; bientôt les fonds structurés et le private equity ; puis l'expansion européenne, déjà amorcée en Belgique, Suisse, Luxembourg et Espagne. Toujours sans publicité, sans compromis sur la donnée, avec des serveurs doublés en Europe pour rassurer les banques.
À 34 ans, Vincent Aurez ne parle pas d'exit ni de retraite anticipée façon FIRE. Ce qu'il veut, c'est « construire un acteur tech souverain, européen », et aller vite, très vite, dans un secteur qui n'a pas encore vu ce que l'IA peut réellement changer. Un mélange d'intuition sociale, d'appétit technologique et de patience artisanale. Une combinaison rare.
- Jean-JacquesManceau